Le coup de coeur rentrée 2010      

astierle Cronos

le Cronos, ce Zodiac de la Brigade fluviale qui ouvre Quai des enfers

Mise en Seine ou Seine de crimes.

Décidément, la Seine n’est pas un long fleuve tranquille : ainsi, l’on y trouve desquai des enfers -Série Noire barques où reposent des cadavres de splendides jeunes femmes tuées en d’atroces conditions et abandonnées en savantes mises en scènes très artistiques. La première s’échoue au 36 quai des orfèvres, adresse bien connue des amateurs de polar. Jo Desprez, "Le révérend" et Michel Duchenne, "le dandy", tous deux commandants à la crime, vont tenter de comprendre quel esprit torturé peut ainsi abîmer la beauté féminine pour l’envoyer, non pas sur les eaux du Styx, mais bel et bien s’échouer sur les quais parisiens. Leurs investigations les conduiront d’institut médico-légal en laboratoire de parfumerie, de galerie d’art jusqu’aux recoins les plus sombres des ponts de Paris que ne hantent pas seulement quelques amoureux transis.
Une belle réussite pour un premier roman noir. Ingrid Astier nous livre un thriller qui page après page, contourne les codes du genre: l’auteur nous régale de digressions qui font cohabiter constamment le sublime et le sordide, l’art et le crime, les odeurs de mort et les effluves des parfums les plus précieux. Ainsi, nous côtoierons successivement un "nez" des plus suspects mais dont la blanquette à la vanille reste à découvrir, un directeur artistique dont les goûts vont  des "roses d’Héliogabade" aux monochromes noirs colonisés de mouches mortes, sans oublier un des personnages principaux du roman : la Seine. C’est d’ailleurs une des originalités du roman que de s’immerger dans les eaux du fleuve et de nous faire découvrir le travail de la police fluviale. Seul bémol, les nombreuses anecdotes racontées par un flic de cette fluviale cassent parfois le rythme du récit mais le lecteur appréciera ces histoires. Comme la précision chirurgicale d’une autopsie ou le passage au crible d’un lieu de crime. Immédiatement suivi d’une bonne bouffe qui semble rasséréner les flics choqués- et on les comprend- par les visions d’horreurs qu’ils découvrent à chaque nouveau meurtre.
« Je n’aime pas les idées, elles sentent l’intention », cette citation de Serge Lutens énoncée dans le livre lui convient parfaitement. Il semble qu’Ingrid Astier ait voulu écarteler le récit entre les plus belles sensations qu’un être humain puisse ressentir et les idées les plus noires qui puisse jaillir de son esprit. En cela, le ton se révèle suffisamment novateur pour qu’on lui pardonne les petits défauts inhérents à un premier roman noir. Et qu’on attende impatiemment le prochain.


Corinne Naidet          precedent coup de coeur     haut de la page  suivant

 




 
 
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